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Soutien

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Comme une machine qui consommerait un maximum de pétrole uniquement pour entretenir sa surchauffe, l'intello du dessous consomme un maximum de facultés intellectuelles pour entretenir sa capacité à surmener son cerveau... en pure perte. Un pur produit de la société de surinformation dans laquelle on patauge...

Aujourd'hui j'ai décidé que tout ça allait sortir, et que je ferais connaître à  d'autres cerveaux surmenés et improductifs le chaos de mes pensées. Ca me fend un peu le coeur d'ajouter au flot d'informations inutiles qui circulent sur le net, mais il paraît qu'un être humain doit s'exprimer pour vivre, il paraît qu'il faut partager ses pensées pour qu'elles ne restent pas vaines. Alors bien sûr, cette décision tiendra jusqu'à ce que la somme d'informations que j'ingurgite chaque jour ne submerge la ressource mémoire où est née l'idée de ce blog, mais ne désespérons pas. Peut-être que le Bouddha qui veilla sur mon berceau me donnera la faculté d'entretenir mon jardin...

 

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14 janvier 2010 4 14 /01 /janvier /2010 21:45
Extrait issu des premières pages de "La Peur" , roman de Gabriel Chevallier, paru en 1930, retiré de la vente en 1939 "Je crains d'être inapte à cette guerre qui ne demande que passivité et endurance. Ne serait-il pa mieux pour mon repos que je fusse un combattant convaincu, comme il en existe, luttant férocement pour sa patrie et persuadé que la mort de chaque ennemi qu'il tue lui gagne des indulgences auprès de son dieu? J'ai ce malheur de ne pouvoir agir qu'en vertu d'un mobile approuvé pour ma raison, et la raison refuse des tutelles qu'on voudrait lui imposer. Mes maîtres , autrefois, me reprochaient mon indépendance; plus tard, j'ai compris qu'ils redoutaient mon jugement et que ma logique d'adolescent soulevait des questions qu'ils avaient décidé de tenir dans l'ombre" Quelle impudeur , ce livre! Oser dire "J'ai eu peur" c'est s'exposer au mépris de tous ceux qui tentent de magnifier ce qu'ils ont vécu pendant la guerre, et de manière d'autant plus violente qu'on sait que ça les remet en face de ce qu'ils ont probablement ressenti mais que tout le monde veut oublier. L'utilité de la guerre reste un grand mystère pour moi, une question impossible à trancher...
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19 avril 2008 6 19 /04 /avril /2008 14:50

Ma mère, prof d'espagnol, adorait étudier des planches de Mafalda avec ses élèves...
Quand j'étais petite fille, pour me la faire découvrir, elle m'avait acheté plusieurs BDs en français dont je ne me lassais pas.
En la relisant il y a peu je me suis rendue compte que non seulement ça me plaisait gamine, mais ça me plaît encore plus maintenant que je comprends mieux toutes ses réflexions politiques ou philosophiques sur le monde :)

















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16 février 2008 6 16 /02 /février /2008 16:14
Je sais, je suis trop catégorique, mais cet article m'a quand même bien fait rire...

http://ladiesroom.fr/2008/02/15/denonciation-secte-non-repertoriee/


J'avoue, je trouve ça honteux d'avoir accès à des offres d'emploi réservées aux HEC; bon le hic c'est que même si on diffuse l'offre ailleurs, le cv est pas retenu sans le nom de la secte dessus :)
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27 septembre 2007 4 27 /09 /septembre /2007 13:25
Pour ceux qui n'ont pas encore été  à la  Tribu à Stains,  pour voir les dernières oeuvres d'Mline, sachez que le vernissage a lieu demain soir à partir de 18h30, et que ce sera la dernière occasion d'y faire un saut  (oui, c'est un vernissage avant décrochage...)

Alors je sais, Stains c'est loin  de Paris et tout ça , mais  ça peut valoir le coup quand même. En tout cas, j'y serai .


Un petit rappel de l'adresse (même si elle est déjà là, en haut à gauche)

La Tribu
30 Avenue Louis Bordes
93240 STAINS


Métro 13 Saint Denis-Université puis bus 255 direction mairie de Stains , descendre à François Begue
ou RER D direction Goussainville arrêt Pierrefite Stains puis bus 150 direction porte de la Villette , descendre à Mairie de Stains.
En gros dans le coin y a des arrêts des bus 150, 252 et  255, y a la Mairie de Stains, la Poste centrale de Stains, le gymnase Joliot Curie pour les jeunes, le foyer Ambroise Croizat et la Maison de retraite Saint vincent de Paul pour les vieux, la Bibliothèque Aragon pour les intellos, le marché Barbusse... Vous trouverez bien quelqu'un pour vous indiquer :p

Et si votre truc, c'est plutôt la musique , il y aura un concert de Tomislav  à partir de 21h; à découvrir ici
Ca me  plaît bien, une bonne occasion de le découvrir :-)
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30 août 2007 4 30 /08 /août /2007 11:29
Je me suis plongée dans la lecture d'un livre de Jean-Paul Carrière "Fragilité"

J'avais été séduite par la présentation de ce livre,  moi qui me suis sentie si fragile face à la supposée force de ceux qui m'entouraient; ceux qui réussissaient, qui ne connaissaient pas (ou faisaient mine de ne pas connaître) le doute ou le désespoir. 

A l'arrière du livre on peut lire cet extrait:

"Nous devons préserver notre fragilité comme nous devons sauver l'inutile. L'inutile, parce qu'il nous sauve du simple calcul  productif, maître du monde. Il nous permet de nous en évader, il est notre issue de secours. La fragilité, parce qu'elle nous rapproche les uns des autres, alors que la force nous éloigne".


La dernière partie de cette citation surtout m'avait touchée. Je me demande parfois si je n'ai pas fait, ces derniers temps, un peu exprès  d'échouer, de ne pas trouver le moyen d'être indépendante. C'est que ma fragilité m'avait fait connaître ce qu'il y a de vraiment humain chez les autres,  on  ne peut se faire aider et par là connaître la  générosité (pas seulement matérielle, mais spirituelle) des autres qu'en n'étant mal en point, fragile. L'autosuffisance (j'ai souvent tendance à confondre indépendance et autosuffisance, comme on parle de l'indépendance énergétique de la France) ne permet pas aux autres de nous donner quelque chose: on n'a besoin de rien, et on paraît si fort; "besoin de personne", comme dit la chanson.

J'ai connu ce "besoin de personne" et je me suis sentie très seule. Et j'ai connu aussi le besoin d'être aidée, et je me suis sentie très entourée. Il reste à trouver le juste milieu, celui où personne ne ment et où on est conscients qu'on a besoin les uns des autres, et que ça ne fait pas de l'un le faible et de l'autre le fort. Pas facile à trouver...
C'est ce que Jean Claude Carrière essaye de trouver dans son essai sur la fragilité.

Comme d'habitude, mon introduction a pris plus de place que prévu, je voulais au départ vous faire part de cette étrange comparaison qu'il fait entre les attentats suicides et le sort que nous réservons à notre planète. Elle peut paraître extrême sortie de son contexte, mais il est vrai que notre comportement actuel est étrange; nous savons que nous consommons trop de ressources, que les gazs que nous émettons peuvent tuer énormément de personnes à long terme, que l'équilibre de l'écosystème qui nous a permis de naître à cette planète est tellement perturbé par nos agissements que nous entraînons des espèces entières à la disparition,  et nous sommes incapables de changer de comportement, ou même d'imaginer en changer  (je pense à ces élus locaux qui continuent à dire qu'il est impensable de ne pas construire plus de routes; à ceux qui tiennent absolument à construire encore une autre ceinture  bétonnée autour de la capitale, coûte que coûte, l'économie en a besoin, et le développement économique n'admet pas d'obstacles; mais aussi aux compagnies du voyage compulsif qui affirment le droit à partir à l'autre bout du monde en avion, pour tous, au prix le plus bas, alors qu'on sait que l'atmosphère paye le prix fort.) 

Après s'être penché longuement sur ce qui peut pousser un être humain à se donner la mort en entraînant la vie de centaines d'autres dans un attentat suicide, pour l'obéissance à une loi qu'aucun dieu n'a jamais prononcée, et pour la gloire d'un dieu dont on ignore l'existence, Jean-Claude Carrière en revient à nos agissements quotidiens.
"Et si cette notion de fragilité s'appliquait aussi aux sociétés? Aux traditions religieuses, à toutes les institutions, à tous les organismes, à tous les réseaux que nous avons mis en place pour nous convaincre, nous, les éphémères, que nous sommes solides,[...] construits pour longtemps, pour toujours peut-être? [...] Si une anxiété secrète conduisait certains peuples, ou de larges fragments de certains peuples, à une explosion de témérité brutale, à un barroud d'honneur? [...]
On nous dit parfois qu'il y  a là quelque chose d'animal, un instinct qu'on appelait jadis grégaire, un comportement de bêtes sociales. On nous parle des suicides collectifs de lemmings [...]. Ce comportement animal, s'il est avéré, n'est qu'une partie de leur vie. Serait-il une partie de la nôtre?"

"Ce besoin de salir la planète, de l'empuantir, d'en pourrir l'eau, le sol et l'air jusqu'à la rendre véritablement invivable un jour prochain, serait-il le besoin suprême qui se situerait au-delà même des folies nationalistes, religieuses, idéologiques? La revanche des faibles? La nécessité de détruire ce qui est plus solide que nous, un besoin irresistible, poussé à l'extrême, jusqu'à notre anéantissement sans appel -de quoi le reste de l'Univers, d'ailleurs, se moque éperdument? [...] Il s'en moque pour la bonne raison que si notre planète se suicidait, se faisait exploser au milieu des espaces [...] les autres personnages de notre ciel poursuivraient paisiblement leur danse. [...]
Ce sentiment, non seulement de fragilité mais d'insignifiance radicale, de non-importance, finalement de non-existence, est peut-être à la base de cette pulsion de mort dont nous avons tant parlé sans parvenir à la réduire. Car notre démarche est la même, que nous le voulions ou non, que celle des terroristes que nous accablons. Mettre en marche un climatiseur dans sa voiture, c'est commettre un attentat suicide. Dans le cas du kamikaze, il se tue pour tuer les autres et il le sait. Dans le cas du climatiseur, nous aggravons l'état de l'atmosphère, nous portons dommage aux autres mais aussi à nous-mêmes, à nos amis, à nos enfants. Je n'échappe pas à ce péril de mort que je transmets. Dans le premier cas nous cherchons la mort au nom d'une haine qui s'accroche à un dieu fantôme. Dans le second cas, nous appuyons sur le bouton du tableau de bord au nom d'un dieu réel, qui s'appelle confort, auquel nous sacrifions nos existences sans avoir admis sa divinité.
Cependant, à bien y regarder, les deux démarches sont similaires. Nous commençons par nous inventer un besoin (d'une loi, d'une consolation, d'un peu d'air frais) et nous finissons par en faire un dieu. Hors de question de nous en passer désormais. Et dans les deux cas les grands prêtres, les profiteurs, les sacrificateurs n'échappent pas aux méfaits qu'ils répandent. Tous dans la même poubelle où s'entassent nos déceptions modernes. Les grands prêtres seront privés de paradis et les industriels de santé. "
C'est sans doute l'excès de cette comparaison qui m'a donné envie de la relever. Mais j'ai beau la trouver excessive, je ne peux m'empêcher de la trouver juste. La différence est dans la relative lenteur de notre attentat suicide. On ne détruit pas la planète en un éclair comme lors d'un attentat suicide , même si on sait que c'est possible, si la folie s'emparaît des chefs des nations qui se sont jugées assez responsables pour avoir le droit de détenir des armes nucléaires sans représenter un réel danger de destruction... pour combien de temps resteront-ils responsables? On préfère ne pas y penser. Notre suicide collectif se fait à  petit feu, en faisant mine d'oublier que notre survie en tant qu'espèce dépend de  la préservation de la planète qui nous accueille. La différence tient aussi dans le fait que nous espérons mourir plus tard que les victimes de notre attentat suicide, les peuples qui n'ont pas eu accès à notre "développement" et qui souffrent les premiers de la désertification, de la montée des eaux, des pollutions.
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25 juin 2007 1 25 /06 /juin /2007 14:24
"Ce que l'on appelle à tort  "production"  n'est qu'une transformation de ressources  qui nous viennent de la nature, de la vie en général, et de la vie intelligente en particulier. Mais plus l'avancée technique nous détache de l'obsession de la production matérielle, plus nous prenons conscience que la "magie" que constitue la création et la démultiplication de richesses n'est rien d'autre que la magie fondamentale de la vie et de l'intelligence. En revanche, si nos sociétés s'obstinent à confondre richesse et monnaie, à ne pas limiter la monnaie à l'un des nombreux moyens qu'ont les humains de faciliter leur échange, alors la vie elle-même et l'intelligence deviennent les enjeux d'une marchandisation généralisée. "

Patrick Viveret, "Reconsidérer la richesse", Editions de l'Aube, collection Aube poche essai p.176
"7. Propriété intellectuelle et brevetage du vivant"

J'ai vu il y a peu de temps un film qu'on a souvent dit mauvais, mais qui au moins met le doigt sur une marchandisation du vivant qui pourrait arriver un jour, allez savoir... "The Island" , ou comment des êtres humains (certains, pas tous) deviennent des "produits" à qui on nie toute conscience pour éviter de se poser un cas de conscience (justement)
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9 mai 2007 3 09 /05 /mai /2007 00:00
Réfutations
un film de Thomas Lacoste

Seize chercheurs et militants, seize regards acérés sur le monde que nous prépare Nicolas Sarkozy. Ni haine, ni diabolisation, mais la réalité d'une droite décomplexée en passe d'accéder au pouvoir. Une déconstruction implacable de la rhétorique sarkozyste.

Films en 4 Parties :
Partie 1 : http://www.dailymotion.com/video/x1vl30_sarkozy-refutations-14
Partie 2 : http://www.dailymotion.com/video/x1vktz_sarkozy-refutations-24
Partie 3 : http://www.dailymotion.com/video/x1vkil_sarkozy-refutations-34
Partie 4 : http://www.dailymotion.com/video/x1vjlw_sarkozy-refutations-44

Ce film est libre de droit. Nous vous invitons à en assurer la diffusion la plus large (le faire connaître, circuler, projeter, etc.). Il peut aussi être publié sur des sites internet. Nous vous demandons cependant une seule mention obligatoire :
« Pour soutenir cette action, qui en appelle de nouvelles, vous pouvez acheter le DVD du film Réfutations sur le site www.lautrecampagne.org ou par chèque (10 euros) à l’ordre de l’Autre association, 3 rue des Petites Ecuries, 75010 Paris. »
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23 mars 2007 5 23 /03 /mars /2007 07:39
Rien à voir avec le reste des thèmes de ce blog, mais je suis contente que Brian Joubert soit champion du monde...
Je l'avais découvert tout jeunot, en regardant le patinage artistique un dimanche avec mon popa (c'est toute ma jeunesse, le sport à la télé avec papa) et je m'étais dit "waw, il est extra, ce gamin, j'espère qu'il ira loin".
C'est chose faite, il a un peu moins une tête de gamin (même si je suis une ancêtre pour lui! bouh! 29 ans!) et toujours autant de talent et d'originalité.

J'imagine que tout le monde s'en fout, que j'aime bien Brian Joubert, mais au moins avec un billet comme ça, je m'attirerai pas les foudres de son fan club (pas comme avec Alévêque :p )

Mais juste un truc: pitié, pitié, si vous découvrez qu'il soutient Sarkozy pour la présidentielle, ne me le dites pas, ça me rendrait très triiiiiste  :'(
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22 juillet 2006 6 22 /07 /juillet /2006 13:46

Allez tant qu'à faire, je mets l'article en lecture ici. Je voulais pas trop parler de cet article parce que c'est déjà traumatisant de me dire que c'est paru dans un journal plutôt considéré (oui je sais, je me la joue terrorisée alors qu'à côté de ça, je suis passée à la radio et à la télé pour représenter Génération Précaire, mais c'était pas moi, c'était une stagiaire masquée... L'intello du dessous, elle en dévoile plus sur elle quand même... ).

Mais bon, ça me fait quand même plaisir de mettre un chouette article ici, même si je sais qu'il y a plus de chance qu'on arrive sur mon blog à partir du Monde Diplo que je n'ai de chances d'envoyer des lecteurs en sens inverse. Et en parlant de ce lien affreux qui m'envoie des lecteurs intelligents, je ne sais pas si vous avez remarqué, mais je me suis installé un compteur en bas de la page, histoire de me faire encore plus peur... non, je ne suis pas tout seule sur mon blog en ce moment...!!! (gloups)

Le paradis sur terre des intellos précaires

par Mona Chollet, Le Monde Diplomatique, mai 2006

« Je suis une intello du dessous. De ceux qui grillent des neurones, qui lisent des gigaoctets de livres, de magazines, de pages web, de tracts, de pétitions et n’en ressortent jamais rien. Comme une machine qui consommerait un maximum de pétrole uniquement pour entretenir sa surchauffe, l’intello du dessous consomme un maximum de facultés intellectuelles... en pure perte ! » Tel est l’amer constat qui s’affiche sur le blog (1) tenu par Séverine, diplômée parisienne de 28 ans ballottée entre stages, revenu minimum d’insertion, intérim et chômage. Un sentiment de relégation qu’Alexandre (2), 27 ans, journaliste pigiste (3) et auteur d’une thèse sur l’écologie publiée par une grande maison d’édition, ne comprend que trop bien. S’il reste impuissant à faire fructifier ses idées, d’autres, cependant, ont parfois la délicatesse de s’en charger à sa place : « Il y a les rédacteurs en chef qui, quand on leur propose un sujet d’article au téléphone, répondent : “Très intéressant, pouvez-vous m’en dire plus ?” Et, quinze jours plus tard, on retrouve son sujet dans le journal, traité par un salarié... »

Ils sont ainsi des dizaines de milliers à hanter ce qu’Anne et Marine Rambach, dans Les Intellos précaires (4), ont appelé les « banlieues de l’intelligentsia ». Avec eux, le procédé journalistique classique consistant à recueillir des témoignages, puis à les faire analyser par des « experts », s’avère inapplicable : dotés de tous les outils théoriques nécessaires, habités d’un vif intérêt pour la marche de la société en général, ils sont des analystes très compétents de leur propre situation – d’autant plus que certains ont l’habitude de travailler sur la précarité : un magazine comme Les Inrockuptibles, notamment, qui a trouvé là un créneau éditorial jeune et branché, fait réaliser ses dossiers par des légions de pigistes payés au lance-pierre, voire pas payés du tout. Quant à Anne et Marine Rambach, qui ont la trentaine, elles sont elles-mêmes des « intellos précaires ». Ce qui, d’après elles, caractérise ces derniers, c’est qu’ils sont « issus des classes sociales favorisées ou ont accédé à un “capital symbolique” qui est celui des classes “élevées”, mais qu’ils partagent la condition et les revenus des classes sociales défavorisées ». Leur apparition était prévisible : lors du recensement de 1999, on comptabilisait 38,2 % de diplômés du supérieur pour la tranche d’âge des 25-30 ans, contre 7,8 % parmi les plus de 60 ans.

Dans un contexte économique sinistré, on ne voit guère par quel miracle ces jeunes diplômés auraient pu échapper au lot commun. Cependant, le phénomène est encore difficile à faire admettre : dans les mentalités, un haut niveau de culture – parfois doublé d’une certaine reconnaissance professionnelle – reste synonyme de sécurité matérielle. Cette confusion entre gratifications symboliques et financières fait le bonheur des employeurs : « On me propose le plus souvent de travailler gratuitement, en me disant que ça me servira pour plus tard, raconte Alexandre. Mais ça commence quand, “plus tard” ? » Un réalisateur vient de lui confier des recherches pour un documentaire en projet. Il s’est mis au travail hors de tout cadre formel : « Nous n’avons pas encore parlé d’argent », avoue-t-il. Dans des sphères où l’on a des préoccupations aussi élevées, difficile, en effet, de réclamer son dû sans avoir le sentiment d’être un imposteur cupide dévoilant soudain son vrai visage.

Et pourtant... Les intellectuels n’étant pas de purs esprits, leur précarité ressemble souvent à celle du reste de la population. « Je prends tous les boulots qui se présentent, dit Lionel Tran, 35 ans, qui anime à Lyon une structure de microédition, Terre Noire. Des vacations à la fac, des ménages, des ateliers d’écriture... Ma compagne et moi avons la chance d’habiter un appartement bon marché ; il y a quelque temps, le propriétaire a changé : nous avons été terrifiés pendant plusieurs jours à l’idée que notre loyer puisse augmenter fortement, ou que nous puissions être mis à la porte. C’est une vie sur le fil, qui peut basculer au moindre accident. » L’écrivain Yves Pagès, qui a très tôt rendu compte dans ses livres de l’hybridation croissante des parcours professionnels (5), travaille dans l’édition. Il y croise des stagiaires qui, dit-il, font parfois « les trois-huit à eux tout seuls » : « Les uns distribuent des tickets de péage à 2 heures du matin sur une autoroute à 40 kilomètres de Paris, les autres sont caissiers de supermarché... »

Alexandre s’inquiète à l’idée que l’on découvre, en entrant son nom dans un moteur de recherche, qu’il fait « des choses qui n’ont rien à voir », mais aussi qu’il revendique des prises de position politiques. Ceux qui, comme lui, n’ont pas recours aux pseudonymes se font rares ; pour ne pas dire par quels expédients on assure sa survie, ou pour dissimuler des activités militantes qui pourraient effaroucher un employeur, le cloisonnement s’impose. Grite Lammane, 30 ans, qui collabore bénévolement, sous ce nom, au mensuel CQFD, vit de piges et de travaux de réécriture, exécutés sous un autre nom... qui n’est pas non plus le vrai. « Les gens qui me paient ne souhaitent pas forcément que leur structure soit associée à d’autres de mes activités ; d’ailleurs, si je faisais tout sous mon vrai nom, ils penseraient que je suis complètement incohérente. Je ne donne mon vrai nom que pour ce que je peux défendre auprès de tout le monde sans devoir argumenter pendant des heures. » Masques blancs des stagiaires en révolte, pseudonymes, témoignages anonymes : toute une population à la merci du qu’en-dira-t-on hiérarchique semble condamnée à la semi-clandestinité et à la guérilla idéologique. « Une situation saine voudrait que les nouveaux arrivants soient porteurs de certains conflits avec leurs aînés, remarquent Anne et Marine Rambach. Or ce n’est pas du tout ce qui se produit. Un chercheur précaire va se conformer aux idées de son directeur de laboratoire, puisque son gagne-pain en dépend. » On trouve ainsi des chercheurs en sciences sociales qui, travaillant à titre précaire pour la Commission européenne, contribuent à justifier la généralisation des politiques de précarité (lire « Au Royaume-Uni aussi »).

Sans même parler d’engagement politique, le simple statut d’intellectuel peut suffire à susciter la méfiance. Yves Pagès en revient à ses stagiaires : « Beaucoup sont des passionnés, qui ont monté des structures de microédition, des revues... Dans les maisons d’édition, souvent, on les regarde de travers. Les postes-clés y sont tenus par des personnalités issues des divers courants de Mai 68, arrivées là au terme de parcours aussi riches que désordonnés ; leur discours, c’est : “On a connu, c’était fantastique, mais c’est fini.” Dans la génération suivante, ils ont donc choisi de ne voir, et de n’embaucher, que les frais émoulus des grandes écoles, formés au réalisme économique – une évolution semblable s’est produite à Libération, d’ailleurs. On trouve ainsi quantité de commerciaux rhabillés en éditeurs, qui considèrent avec haine ces stagiaires à la tête trop bien faite. »

Les journaux les transforment en pigistes payés au lance-pierre, les universitaires les utilisent comme secrétaires, les auteurs les plus médiatisés s’attribuent le produit de leurs travaux.

Lionel Tran, lui non plus, n’en finit pas de remâcher ses griefs contre la génération des baby-boomeurs. Les derniers titres publiés par Terre Noire le disent assez : La fête est finie, Sous la plage, les ruines (6)... Mais il précise : « Ça n’a rien à voir avec la démarche écœurante de Technikart, du type “poussez-vous de là qu’on prenne vos places”. On aurait besoin de pouvoir inventer nos propres formes de contestation, sans devoir toujours rejouer la grande pantomime de Mai 68 ni verser dans le militantisme ludique, qui me fait vomir. » Il ne se remet pas d’avoir grandi avec des valeurs d’épanouissement personnel qu’il juge inadaptées à la dureté de l’époque : « J’avais 19 ans quand j’ai participé à mon premier projet de presse sur Lyon. Vingt ans plus tôt, au moins une de ces entreprises aurait pu se pérenniser. » Si les livres qu’il édite ne sont pas signés, c’est, dit-il, par rejet d’un « culte de l’ego » qu’il associe à la culture soixante-huitarde. Coïncidence ? Deux journaux alternatifs récemment créés, Le Tigre et Le Plan B, ont fait le choix des pseudonymes pour le premier, et d’articles non signés pour le second. Grite Lammane affirme elle aussi que l’usage des pseudonymes convient bien à sa préoccupation de « contribuer à une œuvre collective » : « Ça ne m’intéresse pas d’être identifiée. »

Elle-même, cependant, vit sereinement avec l’héritage de Mai 68 : « Je travaille le moins possible, parce que je veux donner le moins possible de temps et d’énergie à ce système. J’ai des revenus très faibles, que je compense par la débrouille et par un réseau d’entraide très dense. » Anne et Marine Rambach ont recensé dans leur livre les richesses sociales – du média alternatif (télévision, radio, site Internet...) à la cantine associative – produites par des intellos précaires hors du cadre économique. Séverine a vécu une prise de conscience politique au fil de ses déconvenues, et s’investit désormais dans plusieurs mouvements et associations : « J’ai découvert l’existence d’une autre société, à côté de la première. C’est ce qui m’a sauvée. » Bien qu’issue d’une famille qu’elle dit peu concernée par les bouleversements de Mai 68 – elle est fille d’employés –, Valérie, autre pilier de Terre Noire, diplômée de Sciences Po (Lyon), a quitté un emploi dans la communication pour se consacrer à la photographie et à l’édition. Aujourd’hui, la quarantaine venue, éreintée par dix ans de précarité, elle cherche par tous les moyens à réintégrer le salariat. Pourtant, elle avoue que, même si elle ne le dit pas dans ses entretiens par souci de « ne pas faire peur aux employeurs », elle aimerait mieux trouver un mi-temps, pour ne pas devoir abandonner tout ce qu’elle a construit ces dernières années.

Rien d’étonnant si les intellos précaires – tel Jean Zin, animateur du site Ecologie révolutionnaire (7) – sont les premiers à soutenir la revendication d’un revenu garanti, ou d’une protection sociale continue inspirée par le régime des intermittents du spectacle : ils s’entêtent à vouloir consacrer une part raisonnable de leur temps à des activités qui ont du sens, à la fois pour eux et pour la collectivité ; ce que le cadre économique permet de moins en moins. Un roman récemment paru, L’argent, l’urgence (8), met en scène une intello précaire qui, étranglée par les dettes, accepte un contrat à durée déterminée, et décrit par le menu l’horreur du monde de l’entreprise. Certains se sont indignés qu’on puisse critiquer le travail alors que tant de gens en cherchent désespérément. Commentaire de l’auteure, qui s’y attendait : « C’est un peu comme si on interdisait aux manchots de se plaindre, par égard pour les unijambistes. »

Mona Chollet
 

(1) vous y etes déjà :P

(2) Le prénom a été changé.

(3) Les pigistes sont rémunérés à l’article. Lire Lionel Okas, « Les journalistes aussi... », Le Monde diplomatique, avril 2004.

(4) Anne et Marine Rambach, Les Intellos précaires, Hachette, coll. « Pluriel », Paris, 2002.

(5) Yves Pagès, Petites Natures mortes au travail et Portraits crachés, Verticales, Paris, 2000 et 2003.

(6) www.editionsterrenoire.co m

(7) http://perso.wanadoo.fr/marxie ns

(8) Louise Desbrusses, L’Argent, l’urgence, POL, Paris, 2006.

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1 juillet 2006 6 01 /07 /juillet /2006 14:35
Depuis le début de ce blog, je mets de temps en temps dans mes images des toiles tirées du blog d'Mline.

Elle expose à Paris à partir de mercredi prochain , au Glaz'Art ( 7-15 avenue de la Villette, PARIS 19, M° Porte de la Villette) et ça me fait extrêmement plaisir, je vais pouvoir admirer toutes ses toiles en vrai!! (le net c'est bien mais....) Il faut dire qu'elle habite complètement dans le sud de la France, et que du coup je ne me rends pas souvent chez elle...

http://www.glazart.com/glazart/navig/evt.php?id=4486f216df350

Je vous conseille vraiment, c'est un émerveillement ...

Le vernissage a lieu mercredi 5 juillet à 20h, n'hésitez pas à y faire un tour!!

 



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